Les bike parks – Définition et Histoire [Partie 2 – les premiers aménagements]

De quand datent les premiers bike parks ? C’est une sacrée question, et disons le tout de suite, il est certainement impossible d’y répondre de façon tranchée…
Par contre, ce que l’on peut faire, c’est revenir sur certaines étapes clés de l’histoire du VTT. Alors on se rend compte que l’émergence des aménagements spécifiques n’est qu’une étape logique dans une Histoire qui continue de s’écrire sous nos yeux. Un petit voyage dans le temps, cela vous tente ? 

 

XIXè siècle : les premiers freeriders !

On commence par une devinette ! De quand date la première référence écrite d’un homme en vélo sur un chemin de montagne ?
Réponse : 1890 !
Eh oui, près de 80 ans avant l’apparition des premiers VTT artisanaux, il y en avait déjà qui avaient l’idée d’utiliser leur vélo dans les sentiers ! « Mais y’avait pas de routes à l’époque, rien que prendre son vélo, c’était déjà faire du VTT ! » nous direz vous… Exact, mais là, on parle bien de petit chemin piéton dans la montagne… Et surprise, ce n’est pas en Amérique que ça se passe, mais en Angleterre ! Sans proclamer être le premier à avoir fait ça, le britannique Amon Sugden est le premier à avoir averti la presse locale qu’il avait emprunté un col montagneux avec son vélo…
Bien sûr, sachant cela, d’autres aventuriers lui ont emboîté le pas, dans toute la première moitié du XIXè siècle, et on trouve parfois des écrits dans la presse relatant les sorties VTT de l’époque, comme celle-ci :

Article « Over the top » de la revue « Cycling » en 1919. Illustrations Franck Patterson

Bien entendu, on se situe plutôt dans le registre de l’aventure que de la petite ballade dominicale sur le chemin qui contourne la ferme de Mme Dugenou… Pas d’aménagements spécifiques certes, mais il s’agit bel et bien là d’une première étape importante.

 

Les années 70 : On façonne le matériel d’abord

En 1970 arrivent les premiers VTT artisanaux, et tout de suite après, les premières courses : les fameuses « repack races » (voir ici un site très intéressant sur le sujet ) sur le Mont Tamalpais près de San Francisco. On le sait, Joe Breeze et ses accolytes ont modifié considérablement leurs Schwinn en les transformant en « Klunkers » : les premiers VTT artisanaux ! Joe Breeze, outre ses exploits sur la piste, réalise le premier VTT artisanal : Un « Breezer »… la marque existe toujours. Mais aucun document ne relate le moindre aménagement du terrain…

 

Vidéo qui raconte les premiers VTT et la première piste de descente en 3 minutes… avec les vrais acteurs !

Une photo légendaire : Joe Breeze à l’attaque lors d’une des nombreuses Repack races ! photo Wende Cragg

Les années 80 : les premières pistes près de Vancouver

Dans les années 80 arrivent les premiers VTT industriels, avec notamment le tout premier d’entre eux : le Specialized StumpJumper. Et là, bien sûr, nombre de terrains de cross conçus pour le BMX ou la motocross accueillent à partir de cette période des VTT. Sont-ils pour autant des « bike parks » ? Non, puisqu’ils n’ont pas été conçus spécifiquement…
En revanche, les canadiens n’attendent pas longtemps… En 1981, un habitant de Vancouver, Ross Kirkwood, est crédité de la construction du premier trail dans ce qui va devenir le fameux North Shore… La ligne s’appelle « Kirckford trail », elle existe toujours et comporte des drops avec des larges pierres et des virages serrés en épingle. Un tracé « oldschool » dirons nous ! A l’époque, les riders roulaient ces pistes avec des vélos en freins cantilever, des potences de 130mm montées sur des guidons plats, pas de suspensions, des pneus en 2.1  maxi, la selle haute… Des cow boys ! Sans le savoir, Ross Kirkwood avait dessiné puis construit le premier trail d’un site qui allait devenir légendaire dans le milieu du VTT.

Kirkford trail aujourd’hui. Old school on vous dit ! photo NSMBA

Les années 90 : les premiers modules, les premières

compétitions officielles et la première approche professionnelle !
Il faut attendre le début des années 90 pour que les aménagements VTT prennent leur envol. En 1990 naissent les championnats du monde VTT à Durango aux USA, et ces compétitions mondiales imposent des aménagements, notamment pour l’épreuve de descente : bosses et virages relevés. En même temps les premiers sentiers conçus pour le VTT sortent du continent américain, en France (piste de descente de Metabief) ou en Nouvelle Zélande (1993, le trail « Genesis » à Rotorua) par exemple. Mais en 1994 nous attend une invention qui va faire parler d’elle. Dans le North Shore, toujours, sur la piste « Ladies Only », Todd Flander adapte un curieux système pour franchir une zone boueuse et compliquée : 2 bastaings de cèdre posés en long, surmontés de lattes cloués perpendiculairement. Bien pratiques ces passerelles, elles permettent de franchir avec plus de facilité tous les débris végétaux jonchant le sol dans la « rainforest » sur les pentes des montagnes…
Ces passerelles en bois (les « ladder bridges ») vont être imitées et reproduites un peu partout dans le monde. Encore aujourd’hui, ces aménagements qu’on appelle « passerelles North Shore », sont l’objet d’une source intarissable de créativité pour construire des nouveaux modules.

 

Les fameux North Shore ! Crédit photo : North Shore Mountain bike Association

En France, c’est à priori en 1993 avec la piste de Metabief que les français découvrent des aménagements spécifiquement dédiés au VTT par le biais de la piste de descente des championnats du monde cette année dans le Jura. Beaucoup de stations emboîtent le pas de Métabief pour accueillir des compétitions fédérales (Internationaux de France puis coupe de France, Coupes régionales, Coupes du Monde, Avalanche cup etc…) : les pistes de descente fleurissent dans nos stations. Mais bien sûr, ces aménagements sont élitistes : ils ont été conçus pour être sélectifs dans le cadre de compétitions. Il fallait être un vététiste très expérimenté pour ne pas se mettre en danger sur ces pistes. D’ailleurs c’est toujours le cas !
Pourtant, à la fin des années 90, des visionnaires se démarquent. Encore un fois, ils sont canadiens ! Et encore une fois c’est en Colombie Britannique que ça se passe, même si cette fois ci c’est à Whistler. Ce sont les premiers qui se sont dit que, s’ils font des aménagements ludiques et sécurisés, alors ils pourront accueillir un public plus large. Et alors, peut être qu’ils pourront en faire un outil de développement touristique ? On est alors en 1999. La machine se met en route…

Whistler et ses pistes de légende. Ici A-line, ou l’on voit la bande de roulement colorée par les pneus… Photo BikeSolutions

Les années 2000 : ça se professionnalise

16 ans après ses débuts le VTT à Whistler c’est plus de 120.000 visiteurs par an rien que sur les pistes de descente VTT, et plus de 38 millions de dollars de retombées économiques annuelles en 2006 (source MTBCA). Pas mal ! De nombreuses stations partout dans le monde tentent également le pari du VTT de descente, souvent avec succès lorsqu’une vraie approche client est développée. Dans les années 2000, d’autres sites découvrent qu’il est aussi possible de créer des moteurs du développement touristique basés sur le VTT sans remontées mécaniques. Cela se passe dans des pays comme les USA, la Nouvelle Zélande ou la Grande Bretagne. Moab, The Kingdom trails, Whakarewarewa Forest et les 7 stanes sont autant de sites de Ballade XC aménagés, exemplaires et qui attirent plusieurs dizaines de milliers de visiteurs par an chacun. Car le VTT ludique, ce n’est pas qu’en station.

Le monde socio-professionnel s’organise autour des bike parks : de nouveaux métiers émergent : designer et constructeur de pistes VTT (c’est nous !), ou patrouilleur VTT par exemple. Dans le même temps, d’autres métiers classiques s’adaptent à ces nouvelles opportunités (marketing, exploitation, encadrement par exemple).

 

A Rotorua en Nouvelle Zélande, même le McDo fait de la pub pour le  domaine VTT exceptionnel de la station thermale ! Du marketing professionnel – (c) Photo BikeSolutions

Du côté des bike parks réduits et concentrés de type urbain, il est très difficile de dire où se sont créés les premiers. Sans doute car certains d’entre eux sont des anciens terrains de BMX ou autres terrains sauvages transformés petit à petit… Ce que l’on peut dire en revanche, c’est que l’accessibilité de ces derniers ne cesse de s’améliorer. Un phénomène visible dans tous les pays ou ce genre d’aménagement se développe, y compris chez nous bien sûr.
L’histoire est en route ! Ou va-t-elle nous mener ? Réponse dans 10, 50 ou 200 ans, comme vous voulez… car ça ne sera jamais fini.
Sources : MTB Hall of Fame, NSMBA et liens connexes